
Quelle est l'origine de la crise diplomatique qui oppose l'Egypte et cinq pays situés à l'amont du Nil, lesquels ont signé le 14 mai un accord sur le partage du fleuve ?
L'Ethiopie, le Kenya, le Rwanda, l'Ouganda, et la Tanzanie réclament de l'eau pour leur développement. Aujourd'hui, le Nil est partagé entre les pays d'aval : le Soudan en utilise un quart et l'Egypte les trois quarts. Bien qu'elle ne contrôle pas les sources du fleuve, l'Egypte est "hydro-hégémonique". C'est un héritage historique. Elle ne dispose pas d'autre source d'approvisionnement en eau douce, et c'est le fleuve qui, depuis toujours, fait vivre le pays. Pendant la période coloniale, Le Caire a obtenu de la Grande-Bretagne la signature d'un accord très favorable avec les pays d'amont, qui sécurise ses droits et lui garantit un droit de veto sur tout nouveau projet.
L'Ethiopie, le Kenya, le Rwanda, l'Ouganda, et la Tanzanie réclament de l'eau pour leur développement. Aujourd'hui, le Nil est partagé entre les pays d'aval : le Soudan en utilise un quart et l'Egypte les trois quarts. Bien qu'elle ne contrôle pas les sources du fleuve, l'Egypte est "hydro-hégémonique". C'est un héritage historique. Elle ne dispose pas d'autre source d'approvisionnement en eau douce, et c'est le fleuve qui, depuis toujours, fait vivre le pays. Pendant la période coloniale, Le Caire a obtenu de la Grande-Bretagne la signature d'un accord très favorable avec les pays d'amont, qui sécurise ses droits et lui garantit un droit de veto sur tout nouveau projet.
Les pays de l'amont ont-ils d'autres sources d'eau douce ?
Leur pluviométrie est plus élevée qu'en Egypte et au Soudan. Pendant longtemps, ces pays étaient peu peuplés et ont pu se contenter d'une agriculture pluviale. Mais aujourd'hui, il pleut moins qu'auparavant, et leur population croît. Ils réclament le droit de sécuriser leur approvisionnement en eau et en énergie hydroélectrique par des barrages.
Quelle est la marge de manoeuvre de l'Egypte ?
Faible. Les pays de l'amont ont les moyens de financer leurs infrastructures grâce à la Chine, qui les soutient en leur proposant des tarifs défiant toute concurrence. Soit ils les mèneront de façon unilatérale, soit dans un cadre de coopération auquel l'Egypte a tout intérêt à participer, si elle veut avoir accès aux documents et garder une voix au chapitre. L'équilibre politique change dans la région. La Chine gagne de l'influence, l'Egypte en perd.
Pourquoi s'est-elle retirée de la négociation sur le partage ?
L'accord ne comporte en fait aucun chiffre. Il fixe le futur cadre de coopération entre Etats riverains. Une ligne du texte mentionne leur "sécurité hydrique", une formule vague qui devait satisfaire tout le monde. L'Egypte l'a refusée, exigeant que ses droits historiques soient -mentionnés, et son allié le Soudan également. L'Egypte se pense comme propriétaire du Nil. Tout le monde connaît ces droits dans le pays, même l'homme de la rue. La classe politique n'a pas su expliquer au peuple que l'accord ne redistribuait pas l'eau, mais que c'était une base pour la coopération, que la discussion sur les quantités viendrait plus tard. C'est un problème de politique intérieure.
Concrètement, qui craint-elle ?
L'Ethiopie, qui contrôle 85 % du débit du fleuve. Mais le paradoxe est qu'il y a en fait de l'eau pour tout le monde.
C'est-à-dire ?
Enormément d'eau s'évapore du lac Nasser, qui est au milieu du désert. Si des réserves étaient construites dans les montagnes éthiopiennes, cette perte serait très réduite, il y aurait peut-être même plus d'eau dans le Nil - mais elles seraient en dehors du territoire égyptien. De plus, l'Ethiopie s'engage dans l'hydroélectricité. L'Egypte n'a pas grand-chose à en craindre, car ces projets laissent l'eau s'écouler. La véritable menace n'est pas l'Ethiopie, mais le Soudan.
Pour quelle raison ?
C'est le seul pays de la région qui possède un gros potentiel agricole. Des projets d'irrigation, qui, eux, consommeraient énormément d'eau, sont prêts. Mais l'Egypte ne parle pas de cela, car elle ne veut pas mettre en péril cette alliance.
Doit-on craindre des conflits armés liés à l'eau dans la région ?
Pour l'instant, nous sommes dans une guerre des mots, pas de l'eau. L'Egypte mène une grande campagne pour dissuader la République démocratique du Congo et le Burundi de signer l'accord de coopération, car il faut six signatures pour qu'il entre en vigueur. Mais à moyen terme, l'Egypte devra coopérer. Elle a beaucoup plus à perdre qu'à gagner d'un conflit armé avec les pays d'amont. En revanche, si le Soudan veut à son tour plus d'eau, je serai moins catégorique.
Ana Cascao, chercheuse au Stockholm International Water Institute (SIWI)
Propos recueillis par Gaëlle Dupont
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